Le dispositif Dutreil permet aux transmissions par succession ou donation de parts ou actions de société ayant fait l’objet d’un engagement collectif de conservation d’être exonérées de droits de mutation à titre gratuit à concurrence de 75% de leur valeur sans limitation de montant.

Le Projet de Loi de Finances (PLF) 2019 reprend les mesures d’assouplissement du dispositif Dutreil évoquées par le projet de la loi Pacte et son volet fiscal. Plus précisément, sont concernées les dispositions de l’article 787 B du CGI, à savoir la transmission des parts sociales ou actions de société.

Cependant, cette réforme ne remet pas en cause les fondamentaux du dispositif : la mise en place d’un engagement collectif de conservation d’une durée de 2 ans puis un engagement individuel de conservation de 4 ans. Aucune modification concernant le taux de l’exonération ni de la réduction des droits de 50% n’est prévue.

Ainsi, vous trouverez ci-dessous les différentes modifications proposées par la loi « Pacte »et reprises dans le PLF 2019. Ces modifications ne sont, à l’heure actuelle, que des propositions dans l’attente du vote de la Loi de finances fin décembre.

Les nouveautés

Les seuils de détention de l’engagement collectif

Les seuils de détention des droits financiers requis pour conclure un engagement collectif seraient abaissés. En effet, dans le cadre actuel, l’engagement collectif doit porter sur au moins 34% des droits financiers ou des droits de vote pour les sociétés non cotées, seuil réduit à 20% pour les sociétés cotées (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10-20140519 par. 200).

Avec la réforme, une distinction se ferait entre les seuils de détention des droits financiers et ceux des droits de vote. Désormais, le pacte Dutreil pourrait ne porter plus que :

  • sur 10 % des droits financiers et 20 % des droits de vote pour les titres de sociétés cotées,
  • sur 17 % des droits financiers et 34 % des droits de vote pour les titres de sociétés non cotées.

L’engagement collectif réputé acquis

Le réputé acquis serait applicable aux transmissions de titres de sociétés interposées dans la limite d’un seul degré d’interposition et pourrait s’appliquer aux couples de concubins notoires. Les seuils requis s’apprécieraient en tenant compte de la participation globalement détenue par le couple, la fonction de direction ou l’activité principale pouvant être exercée indifféremment par l’un des concubins.

Pour rappel, actuellement, l’engagement collectif est réputé acquis lorsque :

  • d’une part, le défunt ou le donateur, seul ou avec son conjoint ou son partenaire de Pacs, détient de façon directe depuis au moins 2 ans le quota de titres requis pour la conclusion de cet engagement,
  • d’autre part, l’un d’eux exerce dans la société depuis plus de 2 ans, selon les cas, son activité principale ou une fonction de direction.

La cession des titres exonérés durant la phase de conservation

Dans la phase de l’engagement collectif de conservation, la cession ou donation des titres exonérés entraînerait une remise en cause partielle à hauteur des parts données ou cédées, à condition que ce soit réalisé au profit d’un signataire de l’engagement collectif de conservation.

Pour rappel, jusqu’à présent, toute cession pendant l’engagement collectif de conservation entraîne une remise en cause totale de l’exonération pour l’ensemble des signataires et ce, même si le cessionnaire est signataire.

Le cas des holdings

1ère nouveauté : 

L’apport peut avoir lieu immédiatement après la transmission pendant la phase de l’engagement collectif de conservation.
Pour rappel, le dispositif en vigueur permet de réaliser un apport à une holding à la fin de l’engagement collectif, soit un minimum de 2 ans.

2ème nouveauté : 

Dans le cadre actuel, la société bénéficiaire de l’apport doit avoir pour unique objet la gestion de son propre patrimoine composé uniquement des titres apportés.

Avec la réforme du dispositif, la condition inhérente à l’objet de la société citée ci-dessus tomberait. Cela permettrait ainsi à une holding d’être animatrice du groupe et de bénéficier du dispositif Dutreil. Seule condition : que la valeur de son actif brut soit composée à plus de 50% de participations dans la société soumise aux engagements individuels et ce, jusqu’à l’expiration de l’engagement individuel.

3ème nouveauté : 

Dans le cadre de l’apport de titres à une holding ayant bénéficié du dispositif, des associés autres que les bénéficiaires de la transmission ou le donateur pourraient être associés de la holding de reprise à condition que la participation appréciée cumulativement en capital et droits de vote n’excède pas 25 %.

Par ailleurs, et également jusqu’à l’expiration des engagements fiscaux, la holding devra être dirigée par une des personnes soumises aux obligations de conservation et devant détenir globalement 75 % du capital et des droits de vote.

A ce jour, seuls les bénéficiaires de la transmission peuvent être associés de la holding.

4ème nouveauté : 

L’apport à la holding de reprise peut porter sur des titres de sociétés interposées, c’est-à-dire des holdings passives détenant directement une participation couverte par un engagement collectif de conservation dans une société exerçant une activité éligible.

Autre condition : l’actif brut de la holding bénéficiaire de l’apport doit être composé à plus de 50% de participations indirectes dans la société cible jusqu’à la fin de l’engagement individuel de conservation.

La fin des obligations déclaratives

La réforme marque la fin des obligations déclaratives annuelles.

Selon la réforme, pendant la durée des engagements, c’est seulement à la demande de l’Administration que devra être produite une attestation délivrée par la société certifiant que les conditions requises pour bénéficier du maintien de l’exonération ont été respectées continûment depuis la transmission.
Cette attestation devra être transmise dans un délai de 3 mois.

Une attestation sera également à fournir en cas de cessation des engagements fiscaux. Le donataire ou successeur devra ainsi adresser spontanément à l’Administration une attestation délivrée par la société certifiant que les conditions ont été respectées jusqu’à leur terme.

Les oubliés de la réforme

Comme précisé en introduction, la réforme ne porte que sur les dispositions de l’article 787 B du CGI. Aucune transposition n’est donc prévue pour le régime applicable aux entreprises individuelles (article 787 C du CGI).

On note également l’absence de précision de l’administration fiscale sur la notion d’exercice de l’activité principale tant pour le donateur au moment de la donation que pour le bénéficiaire qui doit poursuivre l’exploitation à titre d’activité professionnelle principale. Ce critère imposé par l’Administration fiscale mais régulièrement censuré par la jurisprudence aurait mérité une clarification.

 

Enfin, il est à noter que certains assouplissements apportés au dispositif Dutreil-transmission seraient transposés aux engagements « Dutreil-ISF » grâce à l’adoption d’un amendement de coordination. Ces assouplissements concerneraient le nouveau régime des apports à une holding et l’allégement des obligations déclaratives (art. 16 nonies du projet de loi).

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